L’élection de Donald Trump pour un nouveau mandat présidentiel aux États-Unis aura des répercussions profondes sur l’évolution de l’IA. Les investissements en IA ont augmenté de plus de 40 % sous l’administration précédente, laissant présagé une évolution encore plus grande dans les 4 ans à venir.
Le Manifeste de Trump nous donne un avant-goût des changements à venir : “Nous abrogerons le dangereux décret de Joe Biden qui entrave l’innovation en matière d’IA et impose des idées de gauche radicales au développement de cette technologie”. “À la place, les républicains soutiennent le développement de l’IA fondé sur la liberté d’expression et l’épanouissement de l’être humain”…
Sa politique, fondée sur la dérégulation et le protectionnisme technologique, est susceptible de transformer l’industrie de l’IA de manière significative, influençant les entreprises, les chercheurs et les normes internationales. Ces effets se feront sentir sur les entreprises françaises et l’économie européenne. Le rapport de Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (de 2011 à 2019), exhortant l’Europe à investir massivement dans l’IA et la formation en IA ne fait que plus de sens après cette élection.
La dérégulation : accélérateur d’innovation ou bombe à retardement?
Sous l’administration Trump, les politiques de dérégulation devraient être intensifiées. Trump souhaite alléger les contraintes réglementaires qui pèsent sur le secteur privé, offrant ainsi aux entreprises une plus grande liberté pour développer des solutions d’IA sans les restrictions bureaucratiques qui sont souvent perçues comme des freins à l’innovation. Cela représente une nette rupture par rapport aux administrations précédentes, qui ont mis l’accent sur l’éthique et la sécurité des algorithmes.
Les opportunités d’une dérégulation accrue
Une politique de dérégulation pourrait permettre aux entreprises Américaines de se positionner en leaders incontestés de l’innovation technologique. La réduction des lourdeurs administratives pourrait accélérer l’innovation et permettre aux technologies de pointe d’arriver plus rapidement sur le marché. Cette approche est cohérente avec la volonté de Trump de maintenir les États-Unis en position de leader mondial de l’IA, notamment en favorisant des subventions pour la recherche en IA, en simplifiant les démarches administratives pour les entreprises technologiques, et en instaurant des partenariats public-privé afin de soutenir le développement de technologies d’IA avancées.
Pour les entreprises, une telle liberté peut entraîner une accélération de la mise sur le marché de nouvelles technologies. Les entreprises, grandes comme petites, pourraient expérimenter des concepts innovants plus librement, ce qui pourrait à terme stimuler l’ensemble de l’écosystème technologique. En particulier, la dérégulation permet aux startups d’entrer plus facilement sur le marché, contribuant ainsi à une dynamique plus compétitive et à l’émergence de nouvelles solutions disruptives.
Les conséquences pour les entreprises françaises et européennes
Une dérégulation aussi marquée aux États-Unis pourrait avoir des répercussions négatives sur les entreprises françaises et européennes, notamment dans des secteurs comme l’aéronautique ou l’automobile, où les entreprises comme Airbus et Renault pourraient se retrouver en difficulté face à une concurrence américaine moins régulée. Face à des entreprises américaines bénéficiant d’une régulation assouplie, les entreprises françaises se retrouveraient en position désavantageuse, surtout si elles sont soumises à des réglementations strictes en matière de protection des données et d’éthique comme l’IA Act nous en donne un aperçu.
L’Union européenne pourrait alors être amenée à réévaluer ses cadres réglementaires afin de permettre aux entreprises de suivre le rythme imposé par l’innovation américaine. Cela pose un dilemme pour les décideurs politiques européens : maintenir des normes élevées en matière de protection des données (IA Act) ou assouplir les règles pour stimuler la compétitivité.
Les dangers d’un cadre dérégulé
Une absence de régulation pourrait également entraîner des risques non négligeables. Les systèmes d’IA sans garde-fous adéquats pourraient générer des biais algorithmiques incontrôlés, enfreindre la vie privée, ou être utilisés de manière non éthique. Ces risques peuvent miner la confiance des consommateurs et exacerber les inégalités sociales. De nombreux experts estiment qu’une dérégulation excessive pourrait engendrer des problèmes qu’il serait coûteux de résoudre par la suite, tant au niveau social qu’au niveau économique.
Il est donc crucial d’avoir une régulation équilibrée pour éviter ces dérives. Sans cadre réglementaire, les entreprises pourraient adopter des pratiques abusives, entraînant une baisse de la crédibilité de l’IA auprès du public. Les biais algorithmiques, par exemple, pourraient être amplifiés, renforçant les stéréotypes et discriminant des populations vulnérables. Un cadre de régulation adapté permettrait d’assurer que l’innovation se fait de manière responsable et respectueuse des droits des individus.
IA et emploi : entre opportunités et changement de la “valeur travail”
La dérégulation et le soutien à l’automatisation sous Trump pourraient transformer profondément le marché du travail. Bien que l’IA promette des gains de productivité importants et des réductions de coûts pour les entreprises, elle suscite également des inquiétudes quant à la disparition de nombreux emplois, en particulier ceux nécessitant peu de qualifications.
L’automatisation des processus industriels et des services pourrait entraîner une perte de sens dans la valeur du travail où les tâches sont facilement automatisables. Cette transition nécessitera une grande flexibilité de la part des travailleurs, ainsi qu’une adaptation des compétences dans l’ensemble des secteurs dont les services.
L’importance de la formation
Pour atténuer ces effets, des initiatives de requalification et de formation continue des salariés seront cruciales, aux USA comme en France. Trump a déjà exprimé son soutien à des programmes de formation en IA, mais leur succès dépendra de la coopération entre le gouvernement, les entreprises et les institutions éducatives. L’objectif est de préparer les salariés de demain aux réalités du futur marché du travail, où les compétences technologiques deviendront de plus en plus indispensables.
En Europe, et plus particulièrement en France, des initiatives similaires sont mises en place mais de façon plus timide. Le rapport de Mario Draghi pousse les gouvernements Européens à investir massivement dans l’IA. Les gouvernements devront encourager la formation axée sur les compétences technologiques, permettant aux travailleurs de s’adapter aux nouveaux besoins du marché. Cette adaptation nécessitera une coordination étroite entre les autorités publiques et le secteur privé, ainsi que des investissements significatifs.
Un équilibre entre innovation, sécurité et formation
Le second mandat de Donald Trump pourrait marquer un tournant majeur pour l’Intelligence Artificielle aux États-Unis, avec des effets qui se feront sentir au-delà des frontières américaines. En favorisant une dérégulation accrue, un protectionnisme technologique rigide, cette politique pourrait stimuler une croissance rapide de l’IA, mais au prix de risques éthiques et sécuritaires importants. Les entreprises françaises devront faire face à une concurrence mondiale de plus en plus rude et à un cadre réglementaire complexe. Trouver un équilibre entre l’innovation, la sécurité et la compétitivité tout en maintenant la confiance publique sera essentiel pour garantir un développement durable de l’IA, tant aux États-Unis qu’en France.
La France et l’Europe devront se montrer proactives pour éviter d’être distancées par les avancées américaines. La formation en IA jouera un rôle clé. Cela nécessitera une révision des politiques en vigueur, mais aussi un renforcement des investissements dans la recherche et l’innovation, tout en respectant les valeurs européennes en matière d’éthique et de sécurité. Les choix faits dans les prochaines années détermineront non seulement la place de l’Europe dans l’économie mondiale de l’IA, mais aussi la manière dont ces technologies façonneront la vie des citoyens de chaque côté de l’Atlantique.